Cette nuit du 10 août au 11 août, le bélier bicolore à la corne torsadée n’en finissait pas de bêler. Comme s’il avait compris que tout ce remue-ménage autour de lui en ferait le sujet principal. Il revoyait sa capture dans l’enclos d’infortune où il était tenu captif avec moult congénères venus comme lui d’un pays du nord. Ici la nourriture était abondante, l’herbe drue et même plusieurs fois dans la journée, on lui mettait de l’eau à boire. Il se disait sans doute que la chance était de son côté.
Dans la villa de monsieur Ibrahima SAMAKÉ, on lui avait même enlevé la corde qui servait de laisse ! Que la vie était belle !
Le jour qui précède la Tabaski, les pieux musulmans observent le jeun d’Arafat. De ce fait, il n’y eût aucun feu allumé ni sur les « faitouts » ni dans le foyer de latérite.
La Tabaski est la commémoration du sacrifice du Patriarche Abraham, dans sa foi comme dans sa soumission à son Dieu Créateur. Les musulmans, ses descendants, mettent un point d’honneur à célébrer ce souvenir des Saintes Écritures. Les Samaké du quartier Assabou à Yamoussoukro n’y manquent jamais. Cette année encore toute la famille a fait le déplacement pour ne pas manquer à l’appel du muezzin.
Les femmes ont tôt fait de préparer le petit déjeuner qu’il faudra partager avant de se rendre à la mosquée. Le cadet chargé de la partie d’enjaillement a fait venir une sono quelque peu tonitruante d’où s’élève déjà un Sounou, musique mandingue, aux guitares saturées mais néanmoins envoûtantes pour un jour de partage.
Même le bélier a cessé de bêler, il a fini par comprendre qu’il est à l’honneur et que festoyer passait nécessairement par la dignité de son silence.( 300 mots)